Racontar II

S’il est vrai que la gravure implique le multiple, ma gravure implique le « multiple unique ».
A l’origine il y a la matrice.
Elle va donner naissance à des estampes qui pourraient être des multiples identiques.
Dans ma manière de concevoir la gravure chacune de mes matrices donnera naissance à des monotypes, chacun de mes tirages est unique. Chacune de mes estampes n’a pas de semblable.
La passion que j’ai pour la couleur m’y oblige.
Lorsque je prépare ma (mes) palettes c’est juste du plaisir.
Puis à chaque encrage je pénètre dans une aventure intense.
A chaque fois c’est un voyage dans lequel passé, présent et futur se mélangent.
Le temps n’a plus aucune prise sur moi.
Alors le tirage ne peut être qu’unique car j’ai forcément envie de retrouver à chaque fois la matière vivante de cet état de création pure. 
Depuis deux ans j’ai intégré le noir à ma palette de couleurs.
Jusque là bien qu’appréciant cette couleur, elle ne trouvait pas sa place dans mon travail.
A présent avec le jeu des matrices superposées sur un même tirage, le noir a trouvé son expression.
La gravure est pour moi un art intemporel.
Elle vient de la nuit des temps et les recherches sont intarissables.
A propos de la matrice…j’oscille toujours entre le cuivre et le carton.
Deux supports très différents l’un de l’autre. Incapable de choisir, je vais de l’un à l’autre en permanence.
J’aime dessiner avec une pointe dans le cuivre ou avec une mine de crayon dans un vernis, chauffer une aquatinte, jouer avec la morsure de l’acide, éclater la matière avec un sucre mais aussi utiliser les outils contemporains et croquer librement avec un feutre indélébile ou bien encore transférer le tonnerre d’une image retravaillée sur un rhodoïd.
Avec le carton j’emploie mes cutters pour dessiner.
La matière devient mate ou brillante parfois satinée avec les lavabilisateurs (plastifiants) et mes outils sont des brosses et des pinceaux dont j’aime la sensualité.
Je peux intégrer mes tissus sur mes matrices mais aussi du carborundum et du sable ou encore les branches et fleurs tirées de mes herbiers et cabinet de curiosité.
Lorsque je commence une matrice, quelqu’en soit le support, je n’en connais que très peu de choses.
Je me laisse embarquer et surprendre.
Je pars à la rencontre, à la découverte…Et j’adore ça !